Socialisme ou barbarie au seuil du XXIe siècle

(Manifeste programmatique de la Quatrième internationale)

 

III. Objectif: émancipation généralisée

11. L'objectif global

La solution radicale à la crise mondiale passe par la remise en cause de l'économie marchande généralisée, de la propriété privée des moyens de production et d'échange, de la production orientée vers le profit, de la souveraineté des Etats nationaux, de la mainmise bureaucratique sur les systèmes de protection sociale. Elle s'inscrit dans la perspective d'une Fédération socialiste mondiale démocratique, pluraliste et autogestionnaire.

Le potentiel que recèle l'intelligence et la générosité humaine pourra s'épanouir sous un régime réellement socialiste et démocratique, où la science et la technologie seront au service des hommes et des femmes, et soumises à un contrôle public et critique. La culture et l'enseignement supérieur seront pour la première fois ouverts à tous et toutes. Il peut en résulter un essor de la création culturelle, la libération d'un gigantesque gisement d'énergies encore largement inexploré. Le développement scientifique pourra contribuer à libérer l'homme et la femme du fardeau du travail parcellaire, répétitif, mécanique, monotone, physiquement et psychiquement dévastateur. Mais il exigera une application créatrice et humaniste, c'est-à-dire inconcevable sans un comportement collectif responsable de producteurs(trices) librement associé(e)s sans une autogestion planifiée généralisée.

Une motivation différente du comportement économique pourra résulter petit à petit de l'intérêt de toutes et de tous à une réduction continue du travail mécanique répétitif, vécu par la plupart des producteurs(trices) comme un travail forcé. L'avènement d'une nouvelle citoyenneté, établissant pour la première fois le contrôle de la société sur un appareil étatique et administratif appelé à dépérir, exige une réduction radicale de la journée de travail. La journée de travail de 4 heures éliminerait pratiquement la nécessité d'une bureaucratie professionnelle, et permettrait aux travailleurs de gérer eux mêmes la société. Sans elle, l'autogestion reste largement fictive. Cela aura un écho puissant dans le monde entier.

Cette mesure pilote de la révolution socialiste dans tout pays relativement industrialisé n'est pas une utopie. Elle a de solides bases objectives et subjectives.

Des sources conservatrices estiment à 50% au moins la part du potentiel productif mondial inutilisé, ou utilisé à des fins destructrices (production d'armes) et nocives. Avec l'emploi rationnel de ces ressources déjà existantes à des fins productives et utiles, respectant des impératifs écologiques, il serait possible de marcher vers l'abolition de la misère et du sous-développement dans le "Tiers-monde", sans réduire le niveau de vie moyen des travailleurs d'aucun pays, voire en l'augmentant partout.

Des minorités significatives remettent en cause déjà aujourd'hui "l'éthique du travail" et l'accumulation de biens matériels comme but suprême de la vie sociale. Pour des millions de travailleurs, travailler moins pour vivre autrement passe avant travailler plus pour consommer toujours davantage. Pour des millions d'hommes et de femmes qui prennent conscience des périls écologiques, la qualité de la vie, la protection de l'environnement, le respect d'une nature dont nous sommes partie prenante, la conquête de la dignité humaine, sont plus importants que l'accumulation illimitée de biens matériels.

L'objectif global que nous visons est la réalisation d'une émancipation généralisée des hommes et des femmes de toutes les formes d'exploitation, d'oppression, d'aliénation, de ségrégation qui pèsent sur eux et sur elles. Le socialisme sera pluraliste, pluripartiste, auto-gestionnaire, abolissant le travail salarié, il sera écologiste, féministe, internationaliste, pacifiste, multi-culturel, ou il ne sera pas.

Cela implique notamment qu'il réalise toutes les exigences de la démocratie socialiste la plus large et que l'élection et le remplacement des gouvernements dépendent de véritables décisions libres donc avec choix entre diverses possibilités par le suffrage universel.

 

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